De surprenants hôtes du bord de mer
Lorsque le regard se porte vers le bas à l’occasion d’une promenade en bord de mer, les rochers apparaissent souvent couverts de petits cônes tronqués, dont la couleur varie du blanc au gris. Certains sont également installés sur des coquilles de Moules, de Patelles…
À marée basse, il est difficile d’imaginer que ces petites pyramides émergées sont en réalité des animaux appartenant au groupe des Arthropodes. Il s’agit de petits crustacés communément appelés Balanes, dont il existe de nombreuses espèces.
Selon l’âge de l’individu et l’espèce à laquelle il appartient, le diamètre extérieur est généralement compris entre 1 et 15 mm.
Plan d’organisation
À quoi ressemblent-elles ?
Le corps de l’animal produit une enveloppe rigide, calcifiée et de forme conique, à l’intérieur de laquelle il est rétracté en conditions d’émersion et qui le protège en particulier du dessèchement.
Appelée capitulum, cette enveloppe est formée de deux parties :
• une muraille composée de quatre ou six plaques qualifiées de rostrale, carénale, rostro-latérale et caréno-latérale ;
• un opercule formé de quatre plaques constituant un tergum côté carène et un scutum côté rostre.
Parmi les critères permettant d’identifier les espèces figurent le nombre de plaques composant la muraille, la position de la plaque rostrale par rapport aux plaques rostro-latérales, les dimensions relatives du tergum et du scutum.
Ainsi les espèces appartenant aux genres Balanus et Chthamalus possèdent une muraille de six plaques quand l’espèce Austrominius modestus présente une muraille de quatre plaques.
Dans le genre Balanus, la plaque rostrale recouvre les plaques rostro-latérales alors qu’il est recouvert dans le genre Chthamalus.
Immergées les Balanes déploient des expansions hors du capitulum, à la faveur d’une ouverture de l’opercule, révélant que les cônes observés à marée basse sont bien des animaux.
Dans son enveloppe rigide, l’animal est suspendu par la région céphalique.
La tête est accolée à la face interne du scutum. Elle est principalement matérialisée par la bouche associée à des pièces buccales.
Le thorax est plus développé et individualisé. Courbé en U, il est formé de six segments portant de longs appendices composés de deux rames, désignés par le terme cirres.
Les cirres des deux ou trois paires antérieures sont relativement courts et couverts de soies très serrées alors que les cirres des paires postérieures sont très longs, constitués de nombreux articles portant chacun de longues soies.
La présence de cirres est à l’origine du nom du groupe auquel appartiennent les Balanes, désigné par le terme Cirripèdes.
Éléments de biologie
Où et comment vivent-elles ?
Les Balanes sont des animaux vivant fixés sur un support rigide, rocher, coquille voire coques des navires.
Lorsqu’elles sont immergées, les plaques du scutum et du tergum s’écartent, ménageant une ouverture médiane dans l’opercule.
Les cirres sont alors alternativement déployés et rétractés dans le capitulum.
Un cycle se déroule en quatre phases :
• les cirres postérieurs sont déployés, ce qui provoque une dépression dans le capitulum et en conséquence une entrée d’eau ;
• l’eau circule dans le capitulum et traverse le filtre constitué par les cirres antérieurs, qui retient les petites particules flottantes ;
• les cirres déployés basculent vers l’avant et glanent les particules en suspension dans l’eau environnante ;
• le thorax se rétracte, amenant les particules piégées par les cirres postérieurs à la bouche, ce faisant il chasse l’eau du capitulum.
Ainsi, les Balanes se nourrissent des particules en suspension dans l’eau de mer, qu’elles récupèrent en filtrant cette dernière à travers les soies de leurs cirres.
Elles pratiquent une alimentation appelée suspensivorie, il s’agit d’une microphagie par filtration.
Bien que fixées, les Balanes réalisent une reproduction sexuée avec accouplement.
Il s’agit d’organismes hermaphrodites, développant à la fois des gonades femelles, les ovaires, et des gonades mâles, les testicules.
Ils possèdent un long pénis extensible, grâce auquel ils peuvent transmettre leurs spermatozoïdes aux individus voisins.
Après la fécondation, le développement des œufs se déroule dans la cavité du capitulum.
Il conduit à des larves nageuses qui sont libérées par l’éclosion et se déversent dans l’eau lors d’une période d’immersion.
Appelées nauplius, elles évoluent dans le plancton.
Leur corps, en forme de goutte, n’est pas segmenté. Il porte trois paires d’appendices à rôle locomoteur et alimentaire. À l’avant, un œil unique est présent, ainsi que deux petites cornes latérales, caractéristiques du groupe des Cirripèdes.
La larve nauplius grandit à la faveur de mues, avant de se transformer en une autre forme larvaire appelée cypris.
Celle-ci recherche un substrat favorable, y adhère et subit une métamorphose. Elle donne ainsi naissance à une jeune Balane fixée.
Sa taille augmente grâce à des mues, mais elles ne concernent pas le capitulum qui présente une croissance continue, par addition de matière.
Les groupes de Balanes, parfois importants, observés sur les rochers sont liés à l’existence à un processus d’attraction des larves par les individus déjà installés.
Pour en savoir plus sur les Balanes
Consulter :
• Brusca R.C., Brusca G.J., 2002 – Invertebrates. Sinauer associates, 936p., Sunderland (USA)
• la page du site Tree of life dédiée aux Cirripèdes
• le site collaboratif Discover Cirripedia (en anglais), présentant les Cirripèdes